Avec la multiplication des objets connectés, les progrès de la catégorisation automatique, de meilleurs systèmes de métadonnées et l’hégémonie émergente des états-plateformes, on peut entrevoir une ville qui fonctionne dans une plus grande intelligence collective. Dans ce billet de blog, on étudie le cas du traitement des déchets
- Le contrôle et la transparence des chaines d’approvisionnement est un enjeux majeur aujourd’hui. Sa contrepartie, les chaines de traitements des déchets devrait bénéficier aussi d’une plus grande transparence, par exemple pour augmenter nos capacités d’innovation dans les techniques de recyclage.
- Le coût réel du déchet est difficile à estimer par le citoyen. Est-ce que mon déchet est bonifié dans une autre chaîne de valeurs ? Ou est-il transporté vers une déchetterie à plusieurs milliers de kilomètres ? Quel est son impact écologique ? Les réponses à ces questions sont des signaux indispensables pour que les citoyens puissent se forger une conscience écologique collective.
IOT au service des déchets
La ville connectée se munit d’une infrastructure de communication sans précédent dans l’histoire de l’urbanisme. Un réseau de petits ordinateurs munis de capteurs et d’effecteurs, communiquent, s’échangent des données et agissent en coordination.
Les objets du quotidien en rapport avec le traitement des déchets peuvent s’intégrer dans cette nouvelle danse:
- les poubelles connectées indiquent leur niveau de remplissage, leurs types de déchets, et les informations spaciotemporelles d’accès. Ces informations sont utilisées par les sociétés de collecte des déchets pour coordonnées les rondes.
- les caméras de surveillance peuvent être utilisées pour reconnaître les déchets qui jonchent le sol, afin de produire une carte des densités de saletés.
- L’écosystème autoréférenciel engendré par la foule de machines, peut permettre de localiser les déchets dans les photos que les citoyens postent sur les réseaux sociaux.
- Il faudrait mettre en place des entrepôts de tris des déchets automatisés, en fonction du besoin des entreprises. Certains déchets ont encore beaucoup de valeur pour certains acteurs, mais le coût de la chasse au trésor dans les décharges est souvent trop important.
Afin que l’insertion des nouvelles machines dans cet écosystème se passe le plus efficacement possible, de la poubelle personnelle de la résidence, de la benne à ordure, en passant par le camion de ramassage, et du dépotoir jusqu’à l’usine de traitement, tous doivent exposer une interface commune permettant l’interrogation en temps réel.
Les informations produites par ces objets permettent d’optimiser les trajets des agents d’entretien. Des zones de ramassage prioritaires peuvent être calculées et des modèles statistiques peuvent être appris sur ces capteurs. On intégrera ces systèmes avec les autres services de la ville intelligente, par exemple, on priorisera le ramassage autour du stade après un événement sportif.
Cependant, un risque majeur menace cet écosystème, et c’est le même qui atrophie le web sémantique : l’incompatibilité sémantique entre les interfaces des machines. De plus, le déchet évolue avec notre mode de vie, et également nos techniques de tri et de recyclage, nos descriptions doivent suivre ces changements. C’est pourquoi il est indispensable de se doter d’un système de description (de métadonnées) suffisamment flexible pour qu’il puisse s’adapter aux changements.
Une interface commune machine-machine et machine-humain
Définir le déchet n’est pas une tâche aisée : il évolue avec nos pratiques et nos modes de consommation. La perception automatisée de la ville intelligente, c’est-à-dire l’ensemble des activations des capteurs avec leurs catégories, doit pouvoir changer selon nos besoins.
Il est donc indispensable de se munir d’une technologie sémantique qui soit :
- Suffisamment puissante pour représenter l’ensemble de la chaîne de traitement des déchets.
- Collaborativement évolutive, afin de rester à jour avec les évolutions du monde.
- Permettre les ambiguïtés : les nouvelles idées ne sont pas toujours bien comprises.
- Soit compréhensible par tout le monde sans effort.
- Doit présenter ses facettes pertinentes en fonction du consommateur de la métadonnée.
Voici un exemple de types de métadonnées pertinentes pour une poubelle intelligente, du point de vue du service de ramassage :
- niveau de remplissage
- type de déchets
- propriétaire
- historique de ramassage
- information spatiotemporelle sur l’accès à l’objet
- spécification technique de la poubelle
Ces métadonnées doivent être facilement consultés par ceux qui en ont le droit, et ne doivent pas être isolés dans une unique plateforme. Néanmoins, le processus de lecture et d’écriture de ces métadonnées doit se faire sur les médiums de communications les plus évidents pour chaque acteur (ex: citoyen-consommateur: réseaux sociaux, service de coordination du ramassage: API rest etc… ).
Une catégorisation précise et évolutive permettra de décrire l’ensemble de la chaîne de traitement des déchets. Les définitions des objets et des processus dans un tel langage, par exemple IEML, permettent aussi d’ouvrir de nouveaux marchés : ces différents services peuvent s’expliciter dans des contrats intelligents. En effet, le ramassage, le tri, l’entreposage, le nettoyage des espaces publiques, le recyclage, l’incinération ou l’exportation doivent être des opérations transparentes, et si possible, doivent pouvoir se “libéraliser” par le déploiement d’un registre de contrats intelligents, et devrait, in fine déboucher sur un marché du déchet.
Grâce à cette infrastructure, on peut alors estimer le coût réel du déchet. Ce dernier doit être le plus transparent possible pour le citoyen, afin qu’il puisse connaitre l’impact de ses actes.
Les réseaux sociaux comme plateforme d’échange privilégiée
Les réseaux sociaux sont la nouvelle place publique. Le citoyen doit pouvoir interagir avec l’ensemble de la chaîne de traitement du déchet par des interactions sociales sur les réseaux. En particulier, il doit pouvoir:
- Contacter et interagir avec l’ensemble des acteurs de la chaîne de traitement. Les acteurs peuvent être des responsables humains ou des machines.
- Demander des informations personnelles ou publiques spécifiques (rapport automatique), déclencher des traitements administratifs (ramassage non-conventionnel, problème de matériel, changement d’adresse etc…) ainsi que faire des requêtes spécifiques exceptionnelles.
Enfin, nos moyens de communication conditionnent la taille de nos sociétés, et le médium algorithmique permet, par la conversation stimergique, de proposer, comparer et d’adopter collectivement des représentations durables à une échelle encore jamais égalée. Dans un monde aux changements fréquents et brutaux, il est indispensable de construire les bons outils pour relever nos défis collectifs.